Dérapages de la loi sur l'hospitalisation forcée: "C'est assez!", dénonce un organisme de défense des droits

MONTREAL, le 15 avr. /CNW Telbec/ – Dans une publication lancée
aujourd’hui, un organisme national de défense des droits dénonce l’application
inadéquate de la loi sur l’hospitalisation forcée des personnes dont l’état
mental présente un danger pour elle-même ou pour autrui.
Intitulé « La garde en établissement : une loi de protection… une
pratique d’oppression », ce document critique les dérapages entourant la Loi
P.38.001 laquelle permet de détenir une personne dans un établissement de
santé et la priver de sa liberté, et ce, sans qu’elle ait commis un crime.
Entrée en vigueur en 1998, elle est une loi d’exception parce que son
application contrevient aux droits fondamentaux à la liberté, ainsi qu’à
l’inviolabilité de la personne et de son intégrité.
Le concept de dangerosité est au coeur de la Loi sur la protection des
personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour
autrui. Ainsi, la dangerosité est l’unique condition permettant de garder une
personne en établissement contre son gré : L’état mental de la personne doit
présenter un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui.
Il existe trois types de garde en établissement, mais deux sont utilisées
plus fréquemment : la « garde préventive », qui permet d’hospitaliser une
personne contre son gré, sans ordonnance du Tribunal, pour une période de 72
heures; la « garde autorisée » par le Tribunal, pour forcer une personne à être
hospitalisée pour une période variant, de manière générale, de 21 à 30 jours,
selon les cas.
Les dérapages entourant la mise sous garde en établissement des personnes
sont principalement de quatre ordres, constate l’auteure du document,
l’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé
mentale du Québec (AGIDD-SMQ).
Premièrement, le recours à la garde en établissement est largement
utilisé et la presque totalité des requêtes pour garde en établissement reçoit
l’assentiment de la Cour. « Pour nous, il est clair que la nature
exceptionnelle de la garde en établissement n’est pas respectée. Il est tout
simplement inadmissible que l’on ait recours aussi souvent à une loi
d’exception », résume Doris Provencher, directrice générale de l’AGIDD-SMQ.
Deuxièmement, la notion de dangerosité, au coeur de la Loi, est devenue
un concept élastique, ce qui mène à une application inadéquate de la Loi,
voire à une application illégale. Par exemple :- Des personnes sont mises sous garde en établissement parce qu’elles
sont dérangeantes, non pas parce qu’elles représentent un danger grave
et immédiat, pour elle-même ou pour autrui.

– Des agents de la paix amènent trop souvent des personnes dans un
établissement de santé, contre leur gré, sous la seule présomption d’un
problème de santé mentale.

– Des centres hospitaliers ont mis en place une pratique illégale de
« garde à distance » en offrant à des personnes mises sous garde des
sorties de fin semaine. Pourtant, la Loi est non équivoque, si la
personne n’est plus jugée dangereuse, la garde en établissement doit
être levée.Troisièmement, les droits à la représentation et à l’information sont
brimés, explique Sylvain Caron, coordonnateur de l’organisme de défense des
droits Pleins Droits de Lanaudière. « Trop souvent, les personnes ne sont pas
informées de leurs droits. Très peu de requêtes pour garde en établissement
sont contestées et lorsqu’elles le sont, rares sont les personnes représentées
par un avocat. Nous remarquons aussi qu’une infime partie des personnes que
l’on souhaite voir hospitalisées contre leur gré sont présentes à la Cour »,
dit-il.
Le quatrième dérapage dénoncé par l’AGIDD-SMQ concerne le consentement
libre et éclairé aux soins lequel est circonscrit par le Code civil du Québec.
En effet, pour subir une évaluation psychiatrique ou tout autre traitement,
une personne doit y consentir de manière libre et éclairée, bien qu’elle soit
en garde en établissement. Or, dans la pratique, ce droit est contourné de
diverses façons.
« C’est la manière dont la Loi est appliquée qui pose problème. On sait
que la Loi a été faite pour protéger les personnes, mais ce que l’on constate,
c’est qu’elle a fait place à des pratiques d’oppression et de contrôle
social », explique André Leduc, coordonnateur du Collectif de défense des
droits de la Montérégie.
C’est pourquoi l’Association présente dans sa nouvelle publication une
série de recommandations au Ministère de la Santé et des Services sociaux. Ces
recommandations ont pour objectifs de voir l’esprit de la Loi respecté, mais
aussi de voir la Loi bonifiée afin que ses modalités d’application
garantissent le respect des droits des personnes.

L’AGIDD-SMQ regroupe près de 25 organismes au Québec. L’Association lutte
en faveur de la reconnaissance et de l’exercice des droits pour les personnes
vivant ou ayant vécu un problème de santé mentale.

Renseignements: (en français): Doris Provencher, directrice générale,
(514) 770-2728; Source: AGIDD-SMQ

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