COMMUNIQUÉ DE PRESSE – L’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé mentale du Québec (AGIDD-SMQ) souligne et appuie la sortie récente de deux rapports importants soit: le rapport d’enquête de la Coroner Me Julie-Kim Godin et le Rapport annuel d’activités 2023-2024 du Protecteur du citoyen.
Communiqué de presse
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L’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé mentale du Québec (AGIDD-SMQ) souligne et appuie la sortie récente de deux rapports importants soit: le rapport d’enquête de la Coroner Me Julie-Kim Godin et le Rapport annuel d’activités 2023-2024 du Protecteur du citoyen.
Tout d’abord, l’AGIDD-SMQ a pris connaissance et accueille favorablement le rapport de la Coroner Julie-Kim Godin, faisant suite au décès de Mme Amélie Champagne. L’AGIDD-SMQ a d’ailleurs été entendue lors de cette enquête publique.
Rappelons que Mme Amélie Champagne, qui souffrait de la maladie de Lyme, s’est enlevé la vie à la suite d’une expérience traumatisante à l’urgence psychiatrique du Centre Hospitalier Universitaire de Sherbrooke et à un transfert non souhaité à l’hôpital Notre-Dame de Montréal en raison, entres autres, d’une pratique de sectorisation en psychiatrie. Nous souhaitons souligner plusieurs éléments et recommandations du rapport.
D’une part, Me Julie-Kim Godin relate l’application de la pratique interdite qu’est la sectorisation; pratique qui consiste à donner des services aux gens selon leurs lieux de résidence (code postal). L’application de cette pratique interdite, voir illégale, a vraisemblablement été un élément amplifiant la détresse d’Amélie Champagne et a été déterminante pour la suite des tragiques évènements. L’AGIDD-SMQ est outrée mais pas surprise, de constater qu’en 2024 cette pratique est encore largement utilisée et ce malgré les nombreuses plaintes d’usager.ère.s à différentes instances, malgré une requête en recours collectif de plusieurs millions de dollars en 2008, malgré les nombreux rapports du Protecteur des Usagers et Protecteur du citoyen qui adressent des recommandations à cet égard depuis plus de deux décennies. L’AGIDD-SMQ compte interpeller, encore, le ministère de la Santé et des Services Sociaux (MSSS), ainsi que Santé Québec, afin de mettre définitivement fin à la sectorisation des services en santé mentale et de s’assurer que toutes personnes puissent recevoir des services de santé mentale partout au Québec, tel que le stipule l’art. 6 de la Loi sur les Services de Santé et Services sociaux (LSSSS).
Un autre élément qui retient notre attention dans le rapport de la Coroner est les doléances qu’elle y formule quant à la façon dont on reçoit la détresse des personnes vivant avec des problèmes de santé mentale qui ont des maladies ou malaises de nature physique, notamment la maladie de Lyme. Trop souvent, les personnes qui se présentent aux urgences n’y reçoivent pas un accueil humain, tant pour leur santé mentale que pour la maladie physique.
L’AGIDD-SMQ souhaite introduire ici le phénomène de « masquage diagnostique » qui se décrit comme suit : « Forme de discrimination qui se produit lorsqu’on attribue à tort au trouble de santé mentale des symptômes physiques rapportés par une personne vivant ou ayant vécu avec une problématique de santé mentale ». L’AGIDD-SMQ estime que les professionnel.le.s de la santé ne sont pas encore assez sensibilisé.e.s à ce phénomène qui peut mener, consciemment ou inconsciemment, à des interventions maladroites et bâclées en déshumanisant et dépersonnalisant l’accueil de la détresse psychologique et en négligeant les investigations pertinentes et nécessaires sur les symptômes physiques rapportés par les personnes. C’est malheureusement ce qu’Amélie Champagne et ses parents ont vécu avec les conséquences que l’on connaît. En conséquence, nous exhortons le MSSS d’instaurer un programme de sensibilisation sur le masquage diagnostique et de le dispenser à tous les professionnel.le.s des urgences hospitalières.
L’AGIDD-SMQ salue aussi les recommandations de la Coroner concernant la disposition des lieux des urgences psychiatriques et des unités de soins. D’ailleurs, le 19 septembre dernier, des psychiatres de l’hôpital de Granby ont fait une sortie médiatique pour déplorer les conditions d’hospitalisation et d’hébergement sur l’unité psychiatrique de cet hôpital. « Offrir des lieux adéquats favorisant le rétablissement est souvent la dernière priorité des services de santé et des fondations d’hôpitaux lorsqu’il est question de travaux de rénovations. Or, il va de soi que cela peut faire une différence fondamentale dans la qualité de l’accueil et du parcours de soins des personnes. » mentionne François Winter, porte-parole de l’AGIDD-SMQ.
En deuxième lieu, le Protecteur du citoyen, qui a déposé son rapport annuel jeudi le 19 septembre 2024, fait état de déshumanisation des services publics au Québec, et les services de santé et les services sociaux n’y échappent pas ! L’AGIDD-SMQ souligne et appuie aussi ce rapport et lance un appel à l’endroit du ministère de la Santé et des Services sociaux, du Collège des médecins du Québec et à l’Association des médecins psychiatres du Québec de « Mettre en place des nouvelles actions afin de s’assurer que les médecins œuvrant plus particulièrement auprès de patients présentant des problèmes de santé mentale ou des manifestations suicidaires communiquent et traitent leurs patients avec dignité, compassion, courtoisie et bienveillance, quelles que soient les circonstances. ».
Le manque de compassion et de bienveillance envers Amélie et sa famille n’a fait qu’exacerber la détresse d’Amélie. Pourtant la compassion et la bienveillance contribuent à la qualité des soins et ça ne coûte rien! De plus, les constats et recommandations du Protecteur du citoyen ne sont pas sans nous rappeler le triste drame de Christine Caron, qui a elle aussi vécu une expérience traumatisante aux urgences de l’hôpital Anna-Laberge de Châteauguay alors qu’elle s’y est présentée aux prises avec des idées suicidaires insupportables. Mme Caron y avait reçu des commentaires d’un médecin de l’urgence tel que »Si tu avais voulu te suicider, tu l’aurais déjà fait et tu veux juste faire un show pour attirer l’attention ». Mme Caron s’est suicidée quelques jours plus tard. Dans une des moult lettres qu’elle a écrites juste avant de commettre l’irréparable, Christine Caron a laissé ce message : »C’est triste, il faut faire quelque chose en tant que société pour améliorer l’aide apportée aux gens qui souffrent, aux gens qui ont des troubles de santé mentale. Je suis venue ici de mon plein gré, car mes idées noires étaient devenues insupportables. J’espère que tout changera dans le futur pour toutes les Christine dans le futur, pour toutes les Christine de ce monde qui ont des idées noires et qui veulent juste se faire aider ».
En terminant, nous souhaitons saluer le courage de M. Alain Champagne et Mme Johanne Bossé, parents d’Amélie et récipiendaires du « Prix Orange 2024 » de l’AGIDD-SMQ, ainsi que M. Stéphane Caron et Mme Isabelle Harvey, parents de Christine, pour leur lutte pour la justice dans ces circonstances difficiles. Que le rapport de la Coroner Me Godin et celui du Protecteur du citoyen leur permettent de trouver un certain sentiment de justice et une certaine paix.
Nous espérons que l’ensemble des recommandations de ces deux rapports seront mises en application de façon diligente afin qu’au nom de toutes les Amélie et toutes les Christine, d’autres histoires de vie personnelles ne connaissent pas un tel drame.
Pour consulter le rapport de la Coroner Me Julie-Kim Godin et le rapport annuel du Protecteur du citoyen
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